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Effets combinés de la température et des contaminants métalliques sur la composition des phospholipides membranaires chez des poissons d’eau.

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Fadhlaoui, Mariem (2017). Effets combinés de la température et des contaminants métalliques sur la composition des phospholipides membranaires chez des poissons d’eau. Thèse. Québec, Université du Québec, Institut national de la recherche scientifique, Doctorat en sciences de l'eau, 213 p.

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Résumé

Dans un milieu naturel, les organismes peuvent se trouver face à plusieurs facteurs de stress naturels, comme la variation de la température, de l'oxygène ainsi que la disponibilité de la nourriture, ou d'origine anthropique, comme les contaminants métalliques. Plusieurs travaux ont traité des effets de ces facteurs séparément sur différentes espèces de poissons, alors que dans les milieux naturels, ils y sont exposés simultanément. Les effets combinés des facteurs de stress naturels et anthropiques sont encore peu étudiés. Pourtant, le stress physiologique causé par les facteurs de stress naturels peut affecter la capacité des organismes à s'acclimater aux contaminants, et vice-versa. Dans des conditions de basses températures, les membranes cellulaires des ectothermes deviennent rigides et ils réagissent en augmentant l'insaturation de leurs phospholipides pour restaurer la fluidité membranaire. Des enzymes impliquées dans la conversion des phospholipides membranaires sont impliquées dans cette réponse physiologique. Par exemple, l'activité des désaturases est induite dans des conditions de froid, une réponse visant à rétablir la fluidité membranaire nécessaire pour préserver le fonctionnement de la cellule. Les effets des métaux ont été largement étudiés sur différentes espèces. Il a été démontré qu’une contamination métallique induit de nombreuses pathologies. Les métaux peuvent ainsi modifier l'activité et le fonctionnement de certaines enzymes suite à une production accrue des dérivés réactifs de l'oxygène, les ERO (espèces réactives de l’oxygène). Ces derniers peuvent endommager les molécules biologiques y compris les lipides, les protéines et l'ADN et initier la peroxydation des lipides membranaires les plus polyinsaturés. En particulier, les acides gras les plus polyinsaturés, qui sont plus abondants chez les animaux acclimatés au froid, sont les plus vulnérables au stress oxydant. Une variation de la température induit aussi la production de ces ERO et peut endommager le système de défense antioxydante. L’objectif principal de ce projet est d'examiner les effets combinés de la température et d'une exposition aux contaminants métalliques sur le plan physiologique par le suivi des modifications de la composition des acides gras des phospholipides membranaires en relation avec les capacités de défense antioxydante, la peroxydation lipidique, la capacité oxydative et la transcription de certains gènes codant pour des enzymes impliquées dans le métabolisme des acides gras et dans la défense antioxydante. Pour ce projet, des expositions de huit semaines ont été faites avec deux espèces de poissons d’eau douce : la perchaude (Perca flavescens) et le mené à grosse tête (Pimephales promelas). La perchaude a été acclimatée à deux températures (9°C et 28°C) en présence ou non de cadmium (Cd) ou de nickel (Ni). Le mené à grosse tête a été acclimaté à trois températures (15°C, 25°C et 30°C), également avec ou sans Cd ou Ni. À la fin de chaque exposition les poissons ont été sacrifiés, des mesures biométriques ont été prises et le muscle et le cerveau ont été prélevés. Chez la perchaude, des analyses ont été effectuées sur le muscle dans le but d’examiner les effets combinés de la variation de la température et des deux métaux sur la composition des acides gras des phospholipides membranaires, la capacité antioxydante (SOD, CAT, GPx, GST et GSH) et le stress oxydant, mesuré par la peroxydation lipidique en termes de concentration de malondialdéhyde (MDA). Chez les individus acclimatés à 9°C, le taux d’insaturation des acides gras membranaires était plus élevé par rapport à ceux acclimatés à 28°C, en accord avec la théorie d’adaptation homéovisqueuse qui prédit une augmentation des acides gras polyinsaturés (AGPI) dans les phospholipides membranaires pour maintenir une fluidité membranaire optimale. Cependant, suite à l'exposition au Ni et au Cd cette réponse a été altérée : à 9°C, les AGPI ont diminué (principalement les AGPI n-6) devant une augmentation en acides gras saturés (AGS). En revanche, à 28°C, les AGPI ont augmenté à des proportions même plus élevées que celles observées à 9°C. Les différentes composantes du système de défense antioxydante enzymatique (SOD, CAT, GPx et GST) et non enzymatique (GSH) ont agi en coopération pour faire face au stress oxydant pouvant induire la peroxydation lipidique. Bien que le MDA ait été détecté dans toutes les conditions, sa concentration n’a pas été affectée par la température malgré les différences de taux d'insaturation. Cependant, chez les poissons exposés au Ni à 28°C, pour lesquels la proportion d'AGPI était la plus élevée, la concentration du MDA était faible, ce qui peut être dû à une réponse intensive du système de défense antioxydante. À notre connaissance, notre étude est la première à s’intéresser à l’effet des métaux sur la composition membranaire en acides gras. Devant les modifications surprenantes des membranes cellulaires que nous avons observées suite à une combinaison d’un stress thermique et d’une exposition au Cd et au Ni, nous nous sommes intéressés à étudier les mécanismes qui peuvent être impliqués dans ces réponses. Donc dans le but de comprendre ces mécanismes et de réaliser une comparaison interspécifique, les expériences ont été reprises chez le mené à grosse tête en examinant la transcription des désaturases et des élongases impliquées dans le métabolisme des acides gras des phospholipides membranaires et les enzymes de défense antioxydante. Les acides gras ont été analysés dans le muscle et le cerveau. Le niveau de transcription des gènes qui codent respectivement pour les désaturases Δ9, Δ5/6 et Δ4 (scd2, fads2 et degs2) et pour les élongases ELOVL2, ELOVL5 et ELOVL6 (elovl2, elovl5 et elovl6) a été déterminé par RT-qPCR. Contrairement à la perchaude, la combinaison des deux températures élevées, 25°C et 30°C, à une contamination avec le Ni a été critique et a conduit à une mortalité massive des individus avant la fin de la période d’exposition. La composition membranaire différait entre les tissus, le cerveau tendant à être plus riche en AG monoinsaturés que le muscle. En outre, dans le muscle, un ajustement dans la composition des phospholipides membranaires a été observé entre les deux extrêmes de température étudiés (15 et 30˚C) contrairement au cerveau, où l’ajustement s’est produit entre 15°C et 25°C mais pas à 30˚C. Ceci nous mène à suggérer que 30°C est une température critique qui excède la capacité de régulation homéovisqueuse du cerveau. Ainsi, les individus acclimatés à cette température maintiennent une composition riche en AGPI, surtout en acide docosahexaénoïque (DHA), possiblement pour maintenir les différentes fonctions cérébrales. D’autre part, les deux métaux ont agi différemment entre les deux tissus et ont affecté à des niveaux distincts la voie de biosynthèse des acides gras. Comme pour la perchaude, chez le mené à grosse tête la réponse normale d’acclimatation thermique de la composition membranaire a été modifiée en présence des métaux. En effet, à 30°C, dans le muscle, la présence du Cd a inhibé la reconstruction de la membrane. Les AGPI, spécialement les n-3 AGPI ont nettement augmenté, au point où la composition membranaire ressemblait à celle des individus à 9°C. En revanche, dans le cerveau, la présence du Cd a affecté certains acides gras qui ont été compensés par d’autres, probablement dans le but de maintenir une fluidité optimale et conséquemment les fonctions du tissu nerveux qui dépendent énormément de la composition membranaire en acides gras. Cette étude met ainsi en évidence une différence interspécifique et inter-organe de la capacité à restaurer la composition membranaire suite à un stress thermique et métallique. En outre, puisque la transcription des gènes codant pour les élongases et les désaturases n’a pas toujours expliqué les modifications observées dans les membranes, il est probable que ces enzymes ne sont pas les seules à être impliquées dans la réponse de la composition membranaire à un stress thermique et métallique. Dans le muscle, la peroxydation lipidique mesurée en termes de MDA était élevée à 15°C et 25°C, chez les individus ayant des membranes riches en AGPI. En revanche, malgré sa richesse en acides gras insaturés, le cerveau semble être plus protégé contre la peroxydation lipidique par les enzymes de défense antioxydante. La transcription des gènes codant pour ces enzymes a été affectée par les deux facteurs de stress séparés ou combinés mais ne correspondait pas toujours aux modifications observées des activités enzymatiques. Par ailleurs, la température ne modifie pas uniquement la composition membranaire, elle affecte aussi la capacité oxydative ainsi que l’activité de certaines enzymes y compris celles membranaires. Pour explorer les différentes modalités de réponse à un stress thermique et à une exposition au Cd, une comparaison interspécifique a été établie entre la perchaude et le mené à grosse tête pour évaluer le lien entre la modification de la capacité oxydative et la composition membranaire. Deux enzymes indicatrices de la capacité oxydatives ont été choisies : la cytochrome C oxydase (CCO), une enzyme membranaire mitochondriale étroitement en contact avec les phospholipides membranaires et la citrate synthase (CS), une enzyme de la matrice mitochondriale. Chez les deux espèces, à de basses températures, l’augmentation de l’activité de la CCO pourrait être en relation avec le changement des AG constituant les membranes cellulaires. En revanche, la présence du Cd n’a pas affecté l’activité de la CCO chez le mené à grosse tête contrairement à la perchaude où l’activité a été inhibée. Comme il n’y avait pas de corrélation entre l’activité de la CCO et les AG membranaires chez la perchaude exposée au Cd, on suggère que la modification observée n’est pas liée directement aux changements de la structure membranaire en AG. À notre connaissance, les résultats de cette étude soulignant une modification de la réponse normale à la température chez les poïkilothermes en présence de métaux n’ont été évoqués nulle part. Nos travaux ont permis d’émettre quelques hypothèses sur les mécanismes impliqués dans le changement de la composition membranaire en réponse à une exposition aux métaux. D’autres recherches seront nécessaires afin de mesurer directement les effets des métaux sur les activités des désaturases et des élongases et sur d’autres enzymes, comme celles impliquées dans la synthèse des AG et dans leur incorporation dans les phospholipides membranaires.

Type de document: Thèse Thèse
Directeur de mémoire/thèse: Couture, Patrice
Mots-clés libres: poissons d’eau douce; perchaude; mené à grosse tête; température; contaminants métalliques; acides gras; phospholipides membranaires; Perca flavescens; Pimephales promelas
Centre: Centre Eau Terre Environnement
Date de dépôt: 27 nov. 2017 21:00
Dernière modification: 30 mai 2019 17:50
URI: https://espace.inrs.ca/id/eprint/6517

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