Ballard, Jean-Marc; Huchet, François et Lefebvre, René ORCID: https://orcid.org/0000-0002-7938-9930
(2022).
Modélisation numérique régionale des conditions actuelles et en climat futur des ressources en eau souterraine dans la région des anciennes lagunes de Mercier
Rapport de recherche
(R2120).
INRS Centre Eau Terre Environnement, Québec.
Prévisualisation |
PDF (Rapport)
- Version publiée
Télécharger (7MB) | Prévisualisation |
Prévisualisation |
PDF (Cartes)
Télécharger (48MB) | Prévisualisation |
Résumé
Le présent rapport constitue la version finale de la documentation des travaux réalisés dans le cadre du mandat que le MELCC a donné à l’INRS pour la « Modélisation numérique régionale des conditions actuelles et en climat futur des ressources en eau souterraine dans la région des anciennes lagunes de Mercier ». Les travaux ont été réalisés entre décembre 2021 et juin 2022 en quatre étapes : (1) révision du modèle géologique régional ; (2) développement du modèle numérique d’écoulement régional ; (3) estimation (HELP) de la recharge actuelle et en climat futur ; et (4) application du modèle numérique à l’exploitation de l’aquifère régional.
C’est l’aquifère rocheux fracturé régional qui est exploité pour l’approvisionnement en eau souterraine dans la région d’étude. Une nouvelle carte piézométrique représentant le niveau de l’eau souterraine dans l’aquifère rocheux a été produite. Au centre de la région d’étude, on retrouve un
dôme piézométrique à environ 60 m/NMM à partir duquel l’écoulement se fait radialement jusqu’à l’émergence aux cours d’eau.
Les dépôts meubles sur le roc exercent un important contrôle sur la recharge de l’aquifère rocheux. De la base au sommet, la séquence de dépôts meubles est composée de till peu perméable, d’argile marine très peu perméable et d’alluvions. Localement, des sédiments fluvio-glaciaires, tel l’esker de Mercier, érodent le till et sont partiellement recouverts par l’argile. Un nouveau modèle géologique a été développé pour définir la distribution spatiale des unités de dépôts meubles. Ce modèle a servi de base au modèle numérique d’écoulement régional. Des conditions confinées sont présentes surtout dans la partie aval du système d’écoulement, où la topographie est plus basse et où il y a des accumulations d’argile plus épaisses. Les conditions semi-confinées sont présentes surtout aux endroits où le till est présent. L’eau souterraine est évacuée de l’aquifère par des parties de l’aquifère rocheux en contact avec les cours d’eau. Les secteurs où il n’y a pas ou peu de sédiments sur le roc permet la recharge de l’aquifère rocheux.
Une nouvelle estimation de la recharge spatialement distribuée a été faite avec le modèle d’infiltration HELP pour les conditions météorologiques historiques (1981 à 2021 ; 41 ans) ainsi qu’en climat futur (2006 à 2095 ; 90 ans) sur la base de simulations climatiques obtenues d’Ouranos.
L’estimation de la recharge historique faite lors du mandat précédent était de 72 mm/an dans la région d’étude, alors que la nouvelle estimation est de 90 mm/an. La recharge dans un futur proche (2041-2070) a été estimée à 115 mm/an, ce qui représente une augmentation considérable de 25 mm/an (28%).
Un modèle numérique d’écoulement régional a été développé sur la région d’étude d’environ 950 km2, avec un maillage numérique de 73 907 éléments triangulaires prismatiques par couche, soit un total de 2 586 745 éléments pour les 35 couches du modèle numérique 3D. Le maillage a été générée de façon à reproduire cinq unités hydrostratigraphiques, soit le roc et les quatre unités de dépôts meubles au-dessus du roc (till, fluvio-glaciaire, argile, sédiments sur l’argile). La surface du modèle suit la topographie alors que la base est plane et fixée à -300 m d’élévation. La périphérie du modèle suit presque partout des cours d’eau où des charges hydrauliques ont été imposées. Des
charges ont aussi été imposées sur les cours d’eau permanents et certaines parties de cours d’eau
intermittents à l’intérieur du domaine modélisé. La recharge effective au roc a été appliquée à la
surface du modèle en soustrayant de la recharge totale les usages de l’eau souterraine spatialement
distribués (résidentiel, agricole, industriel-commercial-institutionnel, municipal).
Le calage du modèle a été fait (1) en comparant les charges simulées en condition naturelles (sans prélèvement) à la topographie et (2) en comparant les charges simulées en considérant les prélèvements à la carte piézométrique. Cette simulation avec les usages actuels de l’eau souterraine (S0)
et la nouvelle estimation de la recharge (R1) constitue le « cas de base » (S0R1) auquel les autres simulations ont été comparées. Ce cas de base ne mène pas à des rabattements importants du niveau régional de la nappe dans l’aquifère rocheux par rapport aux conditions naturelles ; ces rabattements étant généralement inférieurs à 1 m. La recharge totale moyenne du cas de base est de 90 mm/an et
la recharge effective moyenne considérant tous les types de prélèvements est de 75 mm/an.
À l’aide du modèle calé, le programme de simulation a considéré trois scénarii de pressions sur l’eau souterraine en climat futur avec différentes valeurs d’usage de l’eau souterraine et de recharge. Un scénario « pessimiste » (S3R0) a considéré que la recharge en climat futur serait plus basse que la nouvelle estimation de la recharge historique (R0 ; 73 mm/an), mais que les usages vont augmenter de 38% en climat futur (S3), ce qui mène à une recharge effective de 53 mm/an. Un scénario « intermédiaire » considère la même augmentation des usages (S3) mais aussi une augmentation de la recharge telle qu’estimée pour le futur proche (R3 ; 115 mm/an), ce qui induit une augmentation considérable de la recharge effective (96 mm/an). Enfin, un scénario « optimiste » considère le maintien des usages à leur niveau actuel (S0) et une augmentation de la recharge en climat futur (R3 ; 115 mm/an), ce qui mène à une recharge effective moyenne (100 mm/an).
Les scénarii intermédiaire et optimiste mènent à de légères augmentations du niveau de la nappe régionale au roc par rapport aux conditions actuelles, alors que le scénario pessimiste mène à des rabattements de l’ordre de 6 ou 7 m dans le dôme piézométrique en comparaison avec les conditions naturelles sans pompage. Ce rabattement est du même ordre que la baisse observée par le puits du RSESQ à l’ouest de Saint-Rémi depuis les années 1980. Des simulations du cas de base et du scénario pessimiste ont été réalisées en régime transitoire. Les simulations montrent qu’il y aurait atteinte d’un nouvel équilibre hydraulique menant à des niveaux de nappe à peu près stables en seulement une année.
Les travaux réalisés dans le cadre de ce mandat ont mené à une meilleure compréhension du système aquifère. L’aquifère rocheux s’avère assez productif, la recharge de la nappe dans l’aquifère rocheux est modérée et la piézométrie montre un dôme au centre de la région qui implique un écoulement radial vers les cours d’eau en périphérie. Ainsi, il n’y a pas d’apports d’eau souterraine provenant de l’extérieur de la région d’étude et seule la recharge à l’intérieur de la région renouvelle la nappe. Nos travaux indiquent qu’il pourrait y avoir une augmentation substantielle de la recharge en climat futur et que les pressions déjà très fortes sur l’eau souterraine n’augmenteraient pas dans
le futur. Toutefois, le système aquifère étant très réactif, la variabilité interannuelle des précipitations et de la recharge pourrait mener à des variations importantes du niveau de la nappe.
Les conditions régionales de recharge et de prélèvements pourraient avoir une incidence sur les flux d’eau souterraine vers l’UTES aux anciennes lagunes de Mercier. L’UTES représente aussi régionalement un important site de prélèvement d’eau souterraine. Actuellement, toute cette eau souterraine prélevée pour maintenir le piège hydraulique est traitée puis déversée en surface. Considérant les fortes pressions sur l’eau souterraine dans la région et l’apport de l’UTES à ces pressions, il apparait souhaitable que le nouveau système de confinement de l’UTES permette la récupération d’une partie de l’eau prélevée pour maintenir le piège hydraulique. L’utilisation de cette eau récupérée devra donc considérer les besoins en eau souterraine à l’échelle régionale. Malgré les avancées faites au niveau de la compréhension du système d’écoulement, les travaux
réalisés comportent des limitations et des incertitudes. D’abord, bien que le calage de la recharge
historique soit très bon, une incertitude demeure sur l’estimation de la recharge en climat futur. Ensuite, il y a une incertitude sur l’estimation des usages de l’eau souterraine et le niveau de stress réel sur les ressources en eau souterraine, notamment en relation avec les usages agricoles.
Ainsi, à la suite de ces résultats, constats et incertitudes, nous formulons des recommandations par
rapport au mandat qui nous a été donné. D’abord, il faut souligner l’importance cruciale du maintien du suivi de nappe en considération des incertitudes décrites précédemment. Considérant l’incertitude sur l’estimation de la recharge en climat futur, des travaux plus détaillés seraient requis pour vérifier la représentativité des résultats. L’une des plus importantes incertitudes de nos travaux est reliée à l’estimation des usages de l’eau souterraine, particulièrement les usages agricoles. Il serait important de faire une évaluation plus précise des usages actuels mais aussi de mieux préciser l’évolution future des usages municipaux, résidentiels (avec puits privés), industriels et agricoles. Enfin, pour mettre en perspective le rôle du nouveau piège hydraulique de l’UTES dans la disponibilité de l’eau souterraine dans la région, il faudrait effectuer un inventaire du potentiel des mesures de mitigation ou des sources d’approvisionnement alternatives qui pourraient s’appliquer aux différents usages de l’eau souterraine.
Les travaux ont permis de définir le contexte de l’exploitation régionale des ressources en eau
souterraine dans les conditions présentes et en climat futur. Les résultats devraient donc soutenir le choix de la nouvelle technologie de contrôle hydraulique à l’UTES aux anciennes lagunes de Mercier. Les résultats pourraient aussi servir de base à une gestion active et participative des ressources en eau souterraine qui sont soumises à d’importantes pressions dans la région d’étude.
Type de document: | Rapport |
---|---|
Mots-clés libres: | modélisation numérique; eau souterraine; aquifère rocheux; recharge; région des anciennes lagunes de Mercier; dépôts meubles |
Centre: | Centre Eau Terre Environnement |
Date de dépôt: | 26 mai 2025 18:22 |
Dernière modification: | 27 mai 2025 19:29 |
URI: | https://espace.inrs.ca/id/eprint/16418 |
Gestion Actions (Identification requise)
![]() |
Modifier la notice |